• * Si je vous parlais de neurosciences et de neuroergonomie...*

    Ca vous parle? C'est un de mes sujets de prédilection dans le cadre de la pédagogie. Je trouve que c'est passionnant! Enseignante en G.S / C.P, je me suis  notamment intéressée aux cogni-sciences dans les domaines de la lecture et du calcul mental. Je trouve fabuleux les cheminements amenant les enfants à ces apprentissages et tout ce qu'on peut mettre en place afin d'en faciliter l'accès.

    Et ce matin, je tombe sur l'émission "La quotidienne" sur France 5. L'un des dossiers est consacré au marketting sensoriel... on est loin de l'éducation? Pas forcément. Outre l'intérêt de ce reportage en matière de marketting pur et de la manipulation de tous nos sens par les commerçants, on retrouve l'intervention d'Idriss Aberkann, "super-chercheur" en neuro-sciences qui parle de "neuro-ergonomie" et de "hacking school" au service des apprentissages et des élèves.

     

    Voici un extrait d'interview:

    Parlons un peu de l’école, de l’attention et du temps. A l’école, la connaissance est obligatoire, or celle-ci a très peu évolué pour être capable de capter l’attention. Nous constatons aujourd’hui un monde de divertissement de plus en plus immersif et une école de plus en plus laborieuse en comparaison. En 1905, l’école était super attractive. Ce n’est plus le cas.

     

    Je vais utiliser une métaphore pour parler de la connaissance à l’école. L'enjeu est d'inventer une gastronomie de la connaissance. L'école doit quitter le modèle standardisé du fast-food pour devenir un restaurant 3 étoiles du savoir. Nous le savons depuis Montaigne, "l'enfant n'est pas un vase qu'on remplit, mais un feu qu'on allume". Si le professeur est seulement un distributeur de connaissances, il n'ira pas loin au XXIe siècle : un distributeur, ça s'automatise. Mais, s'il est un catalyseur, un chef étoilé du savoir, son avenir est assuré. Mieux, il prendra du plaisir à donner de l'appétit à ses élèves, tout comme eux à déguster le savoir. Les quatorze services du "Déjeuner des jardiniers" du 3-étoiles Alain Passard sont tout ce que nous devrions transposer à l'éducation : une large diversité de plats, tous succulents, qui rassasie sans alourdir et qui fait passer les papilles par trois niveaux de conscience : "bon sang, je n'ai jamais goûté ça", "je suis bien content d'y avoir goûté", "j'ai envie d'en goûter plus". Dans une bonne école, il serait possible d'enchaîner les cours en s'écriant : "bon sang, ça, je ne le savais pas", "je suis bien content de le savoir", "j'ai envie d'en savoir plus".
    Aujourd'hui, beaucoup de chemins mènent à la ludification, la transformation du travail en jeu. Le grand mathématicien David Hilbert déclarait déjà que "les mathématiques sont un jeu" ; reste à l'expliquer au cerveau. En premier lieu, ne pas nuire. Ce n'est pas au cerveau de s'adapter à l'éducation, c'est à l'éducation de s'adapter d'abord à lui, comme la rivière trouve son lit le plus naturel.

    Ces lectures m'ont permis de ricocher sur le nom de Céline Alvarez, "neuro-psychologue". Son parcours est époustouflant:

    "En France, on estime que 40% des enfants sortent du CM2 avec de grandes difficultés, des lacunes qui vont avoir des graves répercutions sur leur parcours scolaire", explique Céline Alvarez. Ce chiffre est son motto. C'est cette injustice et la découverte de la pédagogie de Maria Montessori qui ont convaincu la jeune femme à passer en candidat libre le concours d'enseignement. "On s'est trompé, martèle-t-elle, l'école s'est trompée. Enfants comme adultes, tout le monde est épuisé. L'école a été construite sur des traditions, des valeurs mais pas sur des connaissances scientifiques, ni sur les principes naturels d'apprentissage".

     

    Je vous invite à visionner son blog, La maternelle des enfants, ainsi que les vidéos de sa conférence   http://www.celinealvarez.org/

    Céline Alvarez a , comme elle l'explique, infiltré l'Education Nationale afin de vérifier les intuitions et recherches en neuro-éducation pendant 3 ans et les résultats sont stupéfiants puisqu'ils ont acquis les principes de lecture, numération, mémoire de travail, vocabulaire, attention ... bien au-delà des compétences attendues fin G.S ! Et tout cela dans le respect du rythme de l'enfant et le bon sens.

    L'idée est d'évoluer dans le sens des mécanismes naturels. Il s'agit de construire l'environnement le plus physiologique possible pour l'être humain dans les années les plus déterminantes de la vie de l'enfant afin de développer tout son potentiel. Ce n'est pas une méthode mais le fait de dégager des invariantes pédagogiques.

    Elle parle beaucoup de la posture de l'adulte en mettant l'accent sur l'exigence que l'on doit avoir en matière de langage, la nécessité de prendre le temps de montrer, de poser le cadre, d'avoir une foi solide et sereine en chaque enfant.

    Elle insiste aussi beaucoup sur les compétences exécutives  (se laver les mains, nettoyer son plan de travail, ranger, attendre patiemment au point d'eau) qui doivent absolument être accompagnées par l'adulte et notamment l'ATSEM qui a toute son importance en tant qu'assistance de l'enseignant. Le mimétisme est très important, par l'adulte mais aussi par les élèves plus grands et plus entreprenants. L'ordre est un leïtmotiv.

    Elle explique la mise en place de sa façon d'enseigner dans la vidéo consacrée à l'installation.

    Céline Alvarez préconise aussi une "liste" de matériel didactique, des idées d'activités complémentaires et les coins à mettre en place (bibliothèque bien sûr, peinture, ellipse dessinée par terre pour la motricité et/ou le coin regroupement, coin lavage avec point d'eau...) et des aires d'apprentissages: activités pratiques, activités plastiques, activités sensorielles, aire de langage, aire de mathématiques, tableau avec affichage ligné pour écrire en cursives; chaque aire ou coin doit invité au respect et à l'ordre, les activités proposées étant placées de gauche à droite en fonction de leurs difficultés. Elle donne même des pistes sur le matériel de base en une liste non exhaustive ici: (les seules règles qui prédominent au choix sont du matériel amenant à des apprentissages s'appuyant sur l'intelligence et l'ordre)

     

    Liste pratique pour démarrer modifiée

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

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  • Commentaires

    1
    Jeudi 4 Août 2016 à 09:26
    La cloche a sonné

    Comme toi, ce sujet me passionne! Je pense que nous avons énormément à prendre et à apprendre des neurosciences appliquées à l'éducation. Céline Alvarez a une approche super intéressante que j'adorerais pouvoir transposer à ma classe... Une chose que j'ai retenu, en tout cas: avoir une confiance infinie en ses élèves et en leurs capacités!

    2
    Jeudi 4 Août 2016 à 09:45

    Tout à fait ! Je suis très admirative du travail qu'elle a entrepris et de la passion qui l'anime en plus de ses compétences. Ca me sidère qu'en outre, elle ait passé le concours uniquement pour mettre en place ses acquis  théoriques afin de vérifier et illustrer ses hypothèses et faire évoluer l'enseignement. Je suis fan!!!cool

    D'un autre côté, à la lecture de ses recherches sur les neurones, les synapses et la plasticité cérébrale, je suis frustrée en pensant à certains parents ne se sentant pas concernés  par la nécessité - et le plaisir- d' interactions  avec leurs enfants dès les premières années de la vie; je pense notamment à certains de mes élèves qui, faute  d'un environnement - non pas privilégié, mais bienveillant et relationnel - ont carrément zappé ces étapes importantes.

    Pourquoi ne fait-on pas appel à des personnes comme elles au ministère de l'Education Nationale!!!!!! oh

    Vive les pionniers tels que Céline Alvarez!!

    3
    Prune77
    Samedi 20 Août 2016 à 11:33

    Voilà un article bien fourni et passionnant. Comme toi, je m'intéresse à tout ce qui touche à la pédagogie Montessori et je pense que l'enseignement doit évoluer vers ce genre de pratiques. Cela va aussi dans le sens des nouveaux programmes qui tendent vers l'autonomie des élèves. Une bien belle expérience qu'a menée là Céline Alvarez. On en redemande.

    4
    Samedi 20 Août 2016 à 12:26

    Tout à fait. J'ai encore du pain sur la planche mais je vais profiter de mon faible effectif pour expérimenter des tacs de choses mises en suspens faute de conditions idéales pour moi!

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